Ce livre de Pascal Ory sera sans doute une lecture utile à ceux préparant le concours commun de Sciences Po dont l’un des thèmes est celui des « Radicalités ». Notre conjoncture historique ramène au-devant de la scène une série de questions sur ce que fut l’expérience politique du XXe siècle. L’anniversaire de la révolution d’octobre 1917 fournit aussi l’occasion naturelle de les examiner. Qu’est-ce que le populisme ? Une idéologie de synthèse qui permet à la droite de trouver le chemin des classes populaires en adoptant un style de gauche. Qu’est-ce que la radicalité ?
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Thèse de l’œuvre
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Pascal Ory, professeur de la Sorbonne et historien, défend sa thèse dans cet ouvrage : le populisme d’extrême droite le plus efficace serait issu de la gauche radicale. L’historien qui n’hésite pas à comparer Jean-Luc Mélenchon à Benito Mussolini.
Globalement, le parallèle de Pascal Ory est complexe à appréhender. Faisant fi du contexte historique, l’universitaire fait entrer toutes les mouvances politiques radicales dans la même logique. « Le génie du populisme est de récupérer les déçus des deux extrêmes », se figure Ory, pour qui « on fait du bon populisme avec la convergence entre la droite et la gauche, plutôt dans leur figuration extrême ».
2. Définition personnelle
Dans cette œuvre Ory définit « la radicalité » comme une mythologie qui rapproche les extrêmes dans un rejet commun de la réforme et du compromis et facilite, le cas échéant, la circulation de l’un à l’autre. Dans certaines conditions de température et de pression politiques, la radicalité de gauche ou la radicalité populiste peuvent accéder au pouvoir. Elles en font alors un usage qui satisfera, le goût de l’absolu qui anime les radicaux et la servitude volontaire qui anime les populistes.
Puis il définit « le populisme » comme une idéologie de synthèse qui permet à la droite de trouver le chemin des classes populaires en adoptant un style de gauche. Le populisme est « une modernisation réussie de la pensée de droite dans un style de gauche ». La droite puiserait selon lui dans « le stock de la gauche » des grandes idées, comme « la souveraineté populaire, la critique des élites et même le national », pour « repartir sur de nouvelles bases » et proposer une « alternative populiste ». Mieux, le populisme se nourrirait directement des échecs des expériences de la gauche radicale. « Depuis la chute du mur de Berlin, le nationalisme et le populisme, c’est une solution, c’est une ressource », explique-t-il. Oubliant que Mussolini et Hitler n’ont pas attendu l’effondrement du communisme en 1989 pour sévir…
3. De qui ou de quoi parle-t-il ?
Fascistes italiens, nazis allemands, indépendantistes catalans, trumpistes américains, léninistes russes, insoumis français… Mélangeant allègrement les époques, il ne les diffère que très peu.
Explorant plus avant le lien entre radicalité de gauche et populisme d’extrême droite, Pascal Ory se fait provocateur, voire caricatural. Il estime que même si le lien n’est pas mécanique, « on fait de bons populistes d’extrême droite avec des gens qui ont une expérience d’extrême gauche ».
Il cite Jacques Doriot (communiste devenu fasciste dans les années 1930), Alain Soral ou Florian Philippot. Mais Pascal Ory ose une comparaison plus poussée : « Mussolini, c’était le Mélenchon de 1914 en Italie. C’était le leader de l’aile la plus à gauche du socialisme. Mais en 1919, quand il crée les faisceaux de combat, il est clairement à l’extrême droite, il sert de nervi à un capitalisme aux abois ». Une analogie qui déclenche l’incrédulité générale et il tente alors de s’expliquer davantage : « En 1914, Benito Mussolini est clairement le leader de la gauche radicale. Ça ne suffit pas à en faire un futur fasciste, mais passé par la guerre… On peut avoir été un Jean-Luc Mélenchon et devenir un Mussolini, mais ce n’est pas fatal ».
Effectivement, Benito Mussolini était membre du Parti socialiste italien avant de virer de bord en 1914 en se déclarant favorable à l’entrée de l’Italie dans la guerre, puis de créer le Parti national fasciste en 1921, avec un projet autoritaire, antisyndical et antisocialiste.
4. Conclusion de l’auteur
Le point commun de toutes ces expériences, selon l’auteur de Peuple souverain est qu’elles finissent toutes par échouer. « Les histoires radicales finissent mal en général », signale le chercheur, pour qui les populations d’aujourd’hui refusent de « regarder le résultat catastrophique du populisme mussolinien, hitlérien, léniniste »… et vont donc déposer des bulletins populistes dans les urnes…
Bonne lecture à tous…
Source : marianne.net