Préparation aux épreuves de dissertation – Note de synthèse – Fiches histoire – Fiches culture générale – Thèmes IEP – Concours de la fonction publique
Fils d’un ingénieur des Ponts et Chaussées, issu lui-même d’une famille d’officiers, Lyautey naît dans un milieu d’aristocratie et de grande bourgeoisie lorraine dont il conservera toujours les sentiments monarchiques ainsi que le sens de l’autorité et de la hiérarchie qu’il équilibre, sous l’influence d’Albert de Mun, par un christianisme social à la fois généreux et paternaliste. Il entre à Saint-Cyr en 1873, suit les cours de l’école d’état-major et devient officier de cavalerie. Les débuts de sa carrière se déroulent en Algérie, puis en France, où il alterne la vie de garnison et les réunions mondaines et littéraires. En 1891, il publie dans la Revue des Deux Mondes un article intitulé “Du rôle social de l’officier dans le service militaire universel”, dont le réformisme fait scandale au sein des hautes sphères de l’armée. Le général de Boisdeffre, alors chef d’état-major, désireux de le protéger du mécontentement de certains de ses supérieurs, l’envoie en Indochine (1894).
C’est donc en Indochine que se produit la rencontre décisive qui transforme le jeune chef d’escadron en colonisateur: celle de Gallieni, qui le prend comme adjoint dans son commandement du Haut-Tonkin et l’initie à ses méthodes, héritées de celles de Bugeaud et surtout de Faidherbe. La conquête doit être une pacification qui fait tache d’huile, et la pacification, une action simultanément politique, administrative, économique et militaire. Vaincre, c’est convaincre et construire. En 1897, Gallieni, devenu gouverneur général de Madagascar, l’appelle à ses côtés et le charge de la pacification et de l’organisation du nord-ouest, puis du sud de la Grande Île (1897-1902). “Je me sentais né pour créer et je crée, écrit-il à sa sœur, pour commander et je commande, pour remuer des idées, des projets et des œuvres, et j’en remue à la pelle.” De retour en France en 1902, il est promu général et commande successivement la subdivision d’Aïn-Sefra (1903-1906), la division d’Oran (1906-1910) et le 10e corps d’armée de Rennes (1910-1912). En 1907, il occupe Oujda et pacifie les confins algéro-marocains, première intervention directe dans l’Empire chérifien.
Nommé résident général au Maroc en 1912, il le demeurera jusqu’en 1925, à l’exception d’une courte interruption au cours de laquelle il sera ministre de la Guerre dans un cabinet Briand (décembre 1916-mars 1917). Son œuvre marocaine, tour à tour exaltée et dénigrée, se caractérise par une double tendance: d’une part, pacifier et restaurer le Maroc traditionnel dans le strict respect du régime du protectorat qu’il définit comme “la pénétration économique et morale d’un peuple, non par l’asservissement à notre force ou même à nos libertés, mais par une association étroite, dans laquelle nous l’administrons dans la paix par ses propres organes de gouvernement, suivant ses coutumes et ses libertés à lui”, conception qu’il oppose à l’administration directe dont il ne veut à aucun prix; d’autre part, créer un Maroc moderne, largement ouvert au monde extérieur et à l’initiative privée. C’est à ce titre qu’il développe la médecine et l’instruction, les voies de communication, les villes et les ports (Casablanca, Kenitra), l’industrie, l’agriculture commerciale et la prospection minière (les phosphates de Kouribga), avec l’aide de jeunes diplomates, d’administrateurs et d’officiers à qui il confie les plus hautes responsabilités. Maréchal de France en 1921, il résiste victorieusement aux assauts d’Abd el-Krim, malgré la modestie des moyens militaires mis à sa disposition. Mal soutenu par le gouvernement, il demande son rappel en 1925. Sa dernière responsabilité officielle fut le commissariat général de la grande exposition coloniale de 1931.
“Lyautey l’Africain”, le “proconsul du Maroc” et le “bâtisseur d’empire”: derrière le vocabulaire de légende se profile la réalité d’un homme pour qui l’action comptait davantage que la doctrine dans le cadre de ce qu’on a pu appeler en son temps un “humanisme colonial”, fondé, prétendait-on, sur le respect des croyances et des coutumes dans un esprit de modération et d’équité. Avec Faidherbe et Gallieni, Lyautey est l’une des trois figures de proue du deuxième empire colonial français.