Sur le thème de la MEMOIRE comme pour celui de la SECURITE il va falloir passer par l’épreuve des définitions et des types de mémoires selon votre sujet. Voici donc les typologies de mémoires et leurs tentatives de définitions…Retenez bien déjà certaines citations et leur auteur…

La mémoire est l’une des fonctions les plus importantes et l’une des propriétés les plus passionnantes du cerveau. Pascal disait déjà : « La mémoire est nécessaire a toutes les opérations de l’esprit ». Il est bien vrai qu’elle régit l’essentiel de nos activités qu’elles soient scolaires, professionnelles, quotidiennes ou de loisirs. Elle construit aussi bien l’identité, les connaissances, l’intelligence, la motricité et l’affectivité de chacun de nous.

Qu’est-ce que la mémoire ?

C’est la fonction qui permet de capter, coder, conserver et restituer les stimulations et les informations que nous percevons. Elle met en jeu aussi bien les structures physiques que psychiques. Il n’existe pas une, mais des mémoires. En effet, en première analyse, on peut distinguer la mémoire sensorielle, la mémoire à court terme et la mémoire à long terme.

Quel est le rôle de ces différentes mémoires ?

Extrêmement brève, elle correspond pratiquement au temps de perception d’un stimulus par nos organes sensoriels. La mémoire sensorielle visuelle (on dit aussi iconique) a une persistance comprise entre 300 et 500 millisecondes. La mémoire sensorielle auditive (ou échoïque) n’est guère plus longue. A ces stimuli visuels et auditifs, peuvent s’ajouter des perceptions captées par les autres sens mais qui semblent jouer un rôle moins important. Ainsi en est-il de la mémoire sensorielle tactile (mémoire haptique). C’est la combinaison de ces différentes perceptions qui permet l’identification de l’information.

Également baptisée mémoire de travail (MT), nous la sollicitons en permanence; c’est une mémoire immédiate qui nous offre la capacité de retenir, pendant une durée comprise entre une et quelques dizaines de secondes, jusqu’à 7 éléments d’information en moyenne.

Comment ce système est-il organisé ?

Evidemment, les informations que nous percevons ne sont pas déversées en vrac dans une sorte de mémoire « réservoir ». Elles sont organisées et régies par des systèmes qui fonctionnent en relation permanente. On fait une distinction entre la mémoire épisodique et la mémoire sémantique, d’une part, et entre la mémoire procédurale et la mémoire déclarative, d’autre part.

  • La mémoire épisodique permet de se souvenir des événements, des noms, des dates et des lieux qui nous sont propres. Elle est très liée au contexte affectif (par exemple: hier, Julien, en voyant un documentaire à la télévision, a appris que « Quito » était la capitale de l’Equateur). La mémoire sémantique concerne les concepts, le sens des mots et des symboles (par exemple : Julien sait, sans se souvenir où et quand il a acquis cette connaissance, que « Paris » est la capitale de la France). Il existe également une mémoire qui concerne la forme des mots, sa « carrosserie », sa prononciation… c’est la mémoire lexicale (ex: « Quito » est composé de deux syllabes, commence par la lettre « Q », se termine par une voyelle etc. …).
  • La mémoire sémantique et la mémoire lexicale sont regroupées sous le terme « mémoire verbale ».
  • La mémoire procédurale correspond au savoir-faire. Elle sert à réaliser des opérations complexes souvent motrices (conduire une voiture, faire du vélo …) et entre probablement en jeu dans l’apprentissage « par cœur ».
  • La mémoire déclarative est celle du savoir dire. Elle permet d’évoquer de façon consciente des souvenirs sous la forme de mots.
La mémoire a-t-elle des limites ?

Si les mémoires sensorielles et à court terme ont des capacités limitées au traitement de l’information, la mémoire à long terme possède de prodigieuses facultés de conservation. Il nous arrive pourtant d’avoir des défaillances et d’oublier, sans pour autant que nous ayons à nous alarmer. L’oubli n’est pas un phénomène anormal. Alfred Jarry écrivait même : « L’oubli est la condition indispensable de la mémoire ».

Quand l’oubli se manifeste-t-il ?

L’oubli intervient parce que notre cerveau est organisé pour éliminer tout ce qui pourrait l’encombrer inutilement ou lorsque l’information n’a pas subi le traitement approprié. Le processus d’organisation est essentiel dans le travail et le succès du rappel : les chances de retrouver un souvenir, dans l’immense bibliothèque qu’est la mémoire sémantique, dépendent de la qualité avec laquelle on a étiqueté ce souvenir. Beaucoup d’oublis ont également une cause affective. Les psychanalystes montrent bien que l’oubli est souvent associé à des événements ou des intentions associés à des affects désagréables ou porteurs de stress.

Quels sont les maladies de la mémoire ?

Les troubles de la mémoire se caractérisent principalement par les amnésies. Des pathologies moins fréquentes sont observées sous le titre de paramnésie et hypermnésie.

  • Certaines sont dues à des lésions cérébrales : les amnésies neurologiques; d’autres ont des causes psychologiques : les amnésies psychiatriques.
  • C’est l’illusion du déjà vu ou du déjà vécu. Isolé et en dehors d’un tableau clinique psychotique (schizophrénie), il s’agit d’un défaut d’interprétation, d’un trouble de la perception parfois lié à la fatigue.
  • L’hypermnésie :Elle est évoquée dans les cas de troubles psychiatriques où les souvenirs du patient occupent une place obsédante, exagérée et même invraisemblable.
Qu’est-ce que la maladie d’Alzheimer ?

De plus en plus fréquente chez les sujets âgés (après 45 ans, mais surtout après 65 ans), la maladie d’Alzheimer affecte le cerveau. Elle se manifeste par une perte de la mémoire à court terme, une confusion mentale et, finalement, par une détérioration physique et intellectuelle totale.

En quoi le vieillissement perturbe-t-il la mémoire ?

Pour Bergson : qu’est-ce que la mémoire ?

La mémoire fait que nous avons une histoire; avoir une his- toire, c’est vivre. La mémoire est donc le fait fondamental du vivant; car le vivant dure. Sa conscience s’étend sur une infinité de plans, qui vont du plan du rêve au plan de l’action; rêver, c’est se plonger dans le passé; agir, c’est se poser sur le présent. Dans le rêve, le moi coïncide avec sa mémoire; dans l’action, il coïncide avec la conscience de son corps.

Le souvenir pur et le rêve
  1. L’inconscient

Les souvenirs accumulés par la durée se conservent. Ils ne sont pas stockés quelque part, inertes, mais déterminent les actes. Un souvenir est la plupart du temps inconscient, mais il est toujours là, qui pousse pour entrer dans le champ de la conscience et agir. Le souvenir inconscient est une action impuissante; c’est sous cette forme qu’il existe et se conserve. Il ne pénètre la conscience qu’à propos. L’ensemble des souvenirs, c’est son histoire; c’est son caractère.

Les souvenirs que nous perdons sont ceux dont nous n’avons pas besoin pour agir; inutiles, ils sont refoulés dans la mémoire pure. Ils n’en sont pas pour autant détruits: le passé est intégralement conservé, mais ne resurgit que pour et dans l’action. Lorsque les exigences de celle-ci se relâchent, la conscience peut se replonger dans le passé: tout est là. Ainsi s’explique que des gens sur le point de mourir, à qui agir devient inutile, se souviennent de toute leur vie en un instant; ainsi s’explique le rêve.

2. Le rêve et la rêverie

Nous ne cessons jamais, même dans le sommeil, d’avoir des impressions de toutes sortes; pourtant, nous n’y prenons plus garde: l’attention est relâchée. Ce n’est pas dire qu’elles sont comme inexistantes: elles fournissent une matière imprécise que nous rapprochons de souvenirs. Le souvenir aspire à être vu, la matière des sensations, à être identifiée; comme ils se rencontrent en un moi détendu et relâché, le lien est lâche et manque de précision; nous interprétons avec fantaisie les sensations du sommeil: c’est le rêve.

Ce qui distingue le sommeil de la veille, c’est donc la distraction du moi. C’est que le moi qui rêve se désintéresse de l’action; veiller, c’est vouloir. Le distrait vit dans le passé dans la mesure même où il se désintéresse de son présent, c’est-à-dire de l’effectif, de l’actif.

3. La mémoire et l’action

Les deux formes de la mémoire

Un corps se meut la plupart du temps par habitude; le passé s’est sédimenté en mécanismes moteurs qui rendent l’action plus efficace. C’est la mémoire du corps, celle de la virtuosité du musicien et du geste machinal. La mémoire proprement dite, ce n’est pas la mémoire habitude, mais c’est celle du souvenir pur; nulle trace sur le corps de son action. Une leçon apprise se conserve sous les deux formes. Elle est à la fois mécanisme du corps – disposition physique acquise à répéter – et ensemble de souvenirs singuliers.

Chaque souvenir est un moment unique de son histoire. Aucun ne se répète entièrement; c’est bien la répétition de quelque chose en un certain nombre de souvenirs qui, à la longue, crée une habitude de mon corps, mais chacun d’eux possède un caractère absolument singulier. Le passé se conserve dans le corps comme un perpétuel présent, et dans l’esprit comme un perpétuel passé.

La durée est mémoire; la mémoire occupe un champ de la réalité qui coexiste avec le présent. Le passé tel que la mémoire le conserve et le présent sont simultanés: le passé existe dans le présent, sous la forme de la mémoire. Le souvenir est présent.

La mémoire et la perception

La plupart du temps nous percevons moins ce que nous avons sous les yeux que le souvenir que la perception rappelle. Quelques lettres d’un mot suffisent à le rappeler en entier. Reconnaître la forme générale d’un mot, c’est s’en souvenir en vue de l’efficacité de l’action.

Le souvenir, naturellement inconscient, cherche à se présenter à la conscience, sous forme d’image; la sensation cherche à se rapprocher de ce que nous avons déjà vu pour être comprise. Le souvenir est indispensable à l’efficacité de l’action.

La totalité du passé cherche à redevenir présent; tous les souvenirs poussent en direction de la perception, seuls quelques-uns y passent. La sélection refoule et appelle à la fois; nous ne nous rappellerions de rien utilement si nous nous rappelions de tout. La mémoire est le principe de succès des actions du vivant.

Pour Platon : qu’est-ce que la mémoire ?

Tous les philosophes antiques se sont intéressés à ce thème mais le grand maître de la mémoire antique, c’est Platon, et sa théorie des Idées. Pour Platon, les mythes de la mémoire sont intégrés dans une théorie générale de la connaissance.

Pour lui, il existe une connaissance ne dérivant pas des impressions sensorielles. Il y a dans notre mémoire les formes ou les moulages des Idées, des réalités que l’âme connaissait avant sa descente ici-bas.

Mais ces idées ne se livrent pas spontanément ; elles restent cachées, voilées, et leur remémoration passe par une ascèse, des « exercices de mémoire » et des techniques de concentration mentale passant par exemple, chez les Pythagoriciens, par une maîtrise de la respiration.

La vocation véritable de l’être humain sera donc de retrouver cette connaissance voilée. C’est un acte qui relève du sacré : du point de vue de Platon, la mémoire artificielle, telle que l’utilisaient les sophistes à des fins professionnelles, ne peut être qu’une profanation de la mémoire. La mémoire platonicienne refuse la vulgarité de cette organisation mnémotechnique, elle se veut en rapport avec des réalités supérieures. Chez Platon, on ne connaît pas, on reconnaît ; on ne se souvient pas, on se re-mémore, et, au-delà des objets particuliers, on accède à un monde des formes premières, des universaux, des archétypes.

Au terme de l’ascèse platonicienne, quand on dit, par exemple, « une fleur », je ne vois plus une fleur particulière, mais l’idée de la fleur, qui les contient toutes, « l’absente de tout bouquet », comme dit Mallarmé. Tous les arts antiques sont traversés par cette stratégie : le peintre Parrhasios confirme à Socrate que, pour représenter la beauté humaine, la peinture se garde bien de copier tel ou tel individu rencontré dans le monde sensible, incapable de fournir un modèle parfait ; mais elle sélectionne dans différents corps les parties les plus réussies, afin de les combiner dans un tout harmonieux ; et le néoplatonicien Plotin explique, dans les , qu’un ensemble n’atteint la beauté qu’à condition que chacun de ses éléments constitutifs soit lui-même beau, ce qui résulte non d’une simple addition, mais d’une capacité à trouver l’unité dans la multiplicité, .

Qu’est-ce que la mémoire collective ?

Le concept de la mémoire collective a été analysé par Paul Ricœur qui propose ce concept dans son ouvrage « La mémoire, l’histoire, l’oubli » (voir article …).

Ricœur tente de comprendre ce phénomène par analogie avec la mémoire personnelle mais le risque serait d’occulter les dimensions de la mémoire collective qui échappent à un tel rapport analogique.

Le thème de la mémoire collective, qui touche de manière essentielle la question du principe de cohésion sociale, assume un rôle singulier dans le contexte hétérogène de nos sociétés contemporaines. La fonction publique de la mémoire collective, sous forme de commémorations ou de musées, tout comme l’évocation de souvenirs traumatisants pour toute une collectivité, suscite un vif débat dans un grand nombre de champs d’analyse, allant des sciences cognitives à la politologie, la sociologie, l’histoire et les autres disciplines des sciences sociales.

C’est le grand mérite de l’ouvrage de Paul Ricœur, « , d’avoir embrassé dans sa réflexion de très nombreux arguments venant de différents champs d’analyse.

Dans , la réflexion de Ricœur ne porte pas seulement sur la mémoire ou l’oubli propre aux individus ou aux groupes restreints, mais à l’ordre politique au sens fondamental du terme. Faisant du souci d’identifier une « juste mémoire » un authentique « thème civique », il implique en même temps une politique et élargit sa réflexion à la mémoire des collectivités nationales et des différents groupes qui les composent, organisée dans les vastes ordres politiques que nous connaissons à l’époque contemporaine. Comment doit-on entendre l’injonction morale à rétablir la « juste mémoire » en appliquant les catégories d’un « trop » de mémoire ou d’un « trop » d’oubli à des vastes collectivités politiques ? Dans quelle mesure cette visée morale est-elle appropriée au domaine du politique ?

Tentative de définition de mémoire collective

C’est l’opposé de la mémoire individuelle qui est comme un jardin secret. Celle-ci, vous la partagez avec d’autres personnes avec qui vous avez un lien. Ce lien peut être familial, culturel ou encore professionnelle…

En s’intéressant à la « mémoire collective on s’intéresse à une mémoire très spéciale, à la limite du surnaturel. En effet, il s’agit d’une mémoire commune à plusieurs personnes. Il peut s’agir d’un souvenir (ou de plusieurs souvenirs) qui ont été enregistrés consciemment ou non.

Ça peut être aussi une expérience partagée. Les éléments concernés sont très variés : coutumes et traditions, manière de s’habiller, fêtes populaires, manières, chansons, point de vue…

Plusieurs facultés mnésiques entrent alors en jeu : sensorielle, visuelle ou auditive, émotionnelle…

On doit la qualification de « collective » au sociologue français Maurice Halbwachs. Celui-ci met en avant, dans son ouvrage «  le caractère partagé des mémoires collectives. Celles-ci se créent et se transmettent encore et encore, de génération en génération.

En 1925, s’ouvrent sur l’histoire d’une petite fille abandonnée retrouvée dans un bois, en France, au XVIIIème siècle. D’origine , plusieurs fois transplantée dans diverses sociétés comme esclave, elle était incapable d’évoquer son passé en l’absence de stimulation visuelle (présentation de photographies d’esquimaux, d’objets leur étant familiers, etc.). Pour HALBWACHS, ce fait est exemplaire du phénomène qu’il cherche à mettre en évidence : nous ne nous souvenons que parce que notre entourage nous le suggère et nous y aide ; sans la mémoire collective, nous serions incapables de nous souvenir.

De façon inattendue et audacieuse, son livre s’ouvre même sur un chapitre consacré au rêve dont la caractéristique est de déconnecter l’individu de son groupe, de l’isoler sur lui-même, de l’enfermer dans son monde intérieur. C’est donc une situation expérimentale inespérée pour tester ce qui revient en propre à la mémoire individuelle.

Il critique ainsi BERGSON à qui il reproche en quelque sorte d’avoir confondu le souvenir avec cette «», considérée comme une forme d’autisme.

Au contraire du rêve, la mémoire nous libère en nous mettant en rapport avec cette communauté de traditions et de souvenirs qu’est tout groupe social.

Dans son ouvrage, HALBWACHS étudie la mémoire collective à travers les différents groupes que sont par exemple la famille, les groupes religieux, les classes sociales et leurs traditions, etc. Contrairement à DURKHEIM qui les avait ignorées, les classes sociales occupent le centre de l’activité d’HALBWACHS.

En étudiant le rêve, HALBWACHS veut donc montrer que le passé ne se conserve pas véritablement dans la mémoire individuelle. Il y subsiste seulement des « », des « », des « » qui ne constituent pas des souvenirs complets. Ce sont les représentations collectives qui en font de véritables souvenirs. La mémoire collective n’est donc pas une sorte de moule, de cadre général, dans lequel les souvenirs personnels viendraient se placer déjà constitués :

  • « La réflexion précède l’évocation des souvenirs», il n’y a pas de mémoire sans intelligence, c’est-à-dire sans travail de la conscience. Et les cadres sociaux de la mémoire sont précisément « les instruments» dont l’individu conscient « se sert pour recomposer une image du passé qui s’accorde» avec les nécessités de son présent, de son existence d’être social, de son harmonie existentielle, de l’équilibre de sa personnalité, de son identité.
  • « Entre le cadre et les événements, il y a identité de nature : les événements sont des souvenirs, mais le cadre aussi est fait de souvenirs. De fait, les souvenirs personnels auto-suffisants n’existent pas, l’individu ne se souvient pas vraiment du passé, il ne peut le revivre en tant que tel, il le reconstruit en réalité à partir des nécessités du présent».

HALBWACHS accorde une importance particulière à la densité des groupes humains car « ».Il en résulte un mélange de représentations à la fois matérielles et humaines, mécaniques et spirituelles qu’on retrouve à peu près identiques dans toutes les grandes agglomérations et qui font que les groupements sociaux ont tendance à s’y dissoudre plus qu’ailleurs (en dehors des moments où ils s’isolent pour se renforcer). De ce point de vue, le fait urbain est certainement le fait de civilisation le plus remarquable : dans la ville la vie collective est plus intense, elle est prise dans un réseau de voies où la circulation est elle-même plus intense que nulle par ailleurs.