Le regain de conflits et tensions que connaissent le Proche et le Moyen-Orient depuis plusieurs années, pourraient bien être une source d’inspiration pour le sujet d’histoire du concours commun de Sciences Po pour 2018…Voici donc matière pour traiter ce thème que nous développons en 3 parties dont voici la seconde dédiée aux grands conflits qui marquent cette région.

 

  1. La manifestation des conflits. Une histoire politique et diplomatique complexe et tourmentée.

Les multiples fractures et enjeux décrits dans la première partie expliquent en grande partie l’histoire politique et diplomatique complexe et tourmentée de la région.

2.1 Une région bouleversée dès la fin de la seconde Guerre Mondiale

La fin de la domination européenne après la Seconde Guerre Mondiale met fin au système des mandats (L’Irak était déjà indépendant depuis 1932, le Liban, la Syrie et la Jordanie le deviennent en 1946. Le Royaume-Uni quitte la Palestine en 1948 et accorde l’indépendance au Koweït en 1961, au Yémen en 1967, puis aux émirats du Golfe en 1971).

Les héritages complexes de l’Empire Ottoman

Jusqu’à la fin de la Première Guerre Mondiale, cette région est dominée par l’Empire Ottoman. Après la chute de celui-ci, Français et Britanniques se partagent la région, ce sont les accords Sykes-Picot de mai 1916.

Les Français reçoivent le Liban et la Syrie, les Britanniques l’Irak et la Palestine. Pour mieux contrôler ces territoires, les Européens tracent des frontières qui ne respectent pas toujours le droit des peuples et créent ainsi de futures difficultés qui expliquent les problèmes frontaliers qui opposent de nombreux États de la région jusqu’à aujourd’hui.

La seconde guerre mondiale n’y changera rien. Le conflit meurtrier entre l’Iran et l’Irak de 1980 à 1988 a comme origine le contrôle de gisements d’hydrocarbures mais également un conflit frontalier dans le sud du pays.

L’invasion du Koweït par l’Irak en 1990, s’explique en partie par le fait que le Koweït, indépendant depuis 1961, faisait partie à l’époque   de l’Empire Ottoman de la Province de Bassorah qui se trouve aujourd’hui en Irak.

En 1917, à travers la Déclaration Balfour, les Britanniques promettent la création d’un foyer national juif en Palestine. Ces promesses contradictoires aux Arabes et aux Juifs annoncent les terribles conflits israélo-arabes à partir de 1948, date de la création de l’État d’Israël.

En 1946 la France accorde l’indépendance au Liban et à la Syrie…Certains États du Golfe Persique n’obtiennent leur indépendance du RU que tardivement, par exemple le Koweït en 1961, le Qatar, le Sultanat d’Oman, les Émirats Arabes Unis et Bahreïn en 1971.

2.2 Le Moyen-Orient, un enjeu pour les grandes puissances durant la Guerre Froide  

Après la Seconde Guerre Mondiale, les EU et l’URSS cherchent à accroître leurs influences respectives dans le cadre de la Guerre Froide et tentent de prendre le contrôle de la région. Le pétrole, les enjeux stratégiques et géopolitiques, notamment les voies de passage et les routes maritimes liées au pétrole, et le conflit israélo-arabe ont fait du Moyen-Orient l’un des épicentres de la Guerre Froide, comme le montre la crise de Suez en 1956. La crise de Suez (1956) marque la fin de l’influence française et britannique. La région bascule alors dans la Guerre Froide, États-Unis et URSS s’appuyant chacun sur des alliés différents.

  • Les EU ont construit un vaste système d’alliances dans la région : le Pacte de Bagdad   en 1955 qui rassemblait les EU, le RU, la Turquie, l’Iran, l’Irak et le Pakistan. Ils sont les plus fidèles soutiens d’Israël. Pour les États-Unis, cette région a pour but de devenir une zone d’ « endiguement » dont l’objectif est alors de créer un « pont stratégique » entre l’Asie occidentale et l’Occident afin d’encercler l’URSS par cette signature du pacte de Bagdad en 1955 et soutien à l’État d’ Israël.
  • L’URSS se présenta comme le défenseur du monde arabe et développa une politique hostile à Israël. Elle se rapprocha de l’Égypte de Nasser. L’URSS fournit des armes et finança la construction du barrage d’Assouan. Pour l’URSS, après le soutien à l’Égypte lors de la crise de Suez, il s’agit de se poser comme le champion des pays arabes (soutien à la Syrie, à l’Égypte et à l’Irak ainsi qu’aux Palestiniens dans leur lutte contre Israël).

En dépit de la victoire territoriale d’Israël, de la France et de la Grande-Bretagne, en dépit d’âpres négociations, la crise de Suez se termine par un échec. Israël est obligé de rendre la bande de Gaza et le Sinaï. En mars 1957, l’armée israélienne évacue donc Gaza, qui repasse sous administration égyptienne, et le Sinaï. Israël réussit néanmoins à obtenir la présence de forces de l’ONU le long de la frontière israélo-égyptienne (à Gaza et à Sharm el-Sheikh), positionnées du côté égyptien, ainsi que la libre circulation dans le golfe d’Akaba.

Cet affrontement par États interposés prend une vigueur particulière lors des conflits israélo-arabes de 1967 et 1973.

2.3 Après la Guerre Froide, une région marquée par une forte influence américaine
La puissance des EU dans la région

La Guerre du Golfe de 1990-1991 confirme la puissance américaine dans cette région. En 1991, ils lancent la première Guerre du Golfe sous couvert de l’ONU à la suite de l’invasion du Koweït par l’Irak.

Échec de la tentative de médiation de l’URSS, qui prouve que les États-Unis restent seule puissance dominante. Soutenus par de nombreux pays de la région et par l’ONU, les États-Unis démontrent leur capacité à contrôler la région.

Les États-Unis ont dirigé à l’occasion une coalition rassemblant plusieurs pays arabes, dont les monarchies pétrolières du Golfe : depuis 1945 et le pacte du Quincy, cette alliance États-Unis/monarchies du Golfe a été une constante.

Ce soutien s’accompagne d’implantations militaires. Le but est d’assurer l’approvisionnement américain en pétrole, contrôler les routes maritimes, limiter l’influence de l’Iran, traditionnellement hostile aux États-Unis, en soutenant d’autres puissances régionales comme l’Arabie Saoudite.

Ce nouveau statut des États-Unis dans la région les conduit également à impulser une nouvelle avancée dans les négociations israélo-palestiniennes (rôle de Bill Clinton dans les négociations conduisant aux Accords d’Oslo, 1993).

En 2003, ils envahissent l’Irak et renversent Saddam Hussein. Les intérêts pétroliers, la lutte contre le terrorisme, la volonté de stabiliser la région et d’y consolider des États démocratiques motivent l’action des EU. En fait, ces interventions déstabilisèrent encore plus la région, l’Irak vit un affrontement meurtrier entre Sunnites et Chiites et la province kurde du Nord n’obéit plus au pouvoir central,   et ternirent considérablement l’image des EU dans le monde musulman.

l’objectif est de renverser un régime politique, celui de Saddam Hussein, pour y substituer un régime démocratique. Consécutive au 11 septembre 2011 et à l’approche unilatéraliste américaine dans la « guerre contre le terrorisme », l’intervention est à forte dimension idéologique (lutte contre l’axe du mal, rôle américain dans la diffusion mondiale de la démocratie). La confrontation avec les mouvements jihadistes issus d’Al-Qaida est désormais irréversible.

Aujourd’hui il existe une nouvelle implication américaine en Irak (aide militaire face aux jihadistes de l’EIIL). Lla menace islamiste pousse finalement les États-Unis à chercher à se rapprocher de l’Iran, puissance stable et influente. L’influence américaine est en restructuration : plus proche de l’Iran, pourtant ennemi de son allié saoudien, et par ailleurs amenée à composer avec d’autres influences dans la région : celles de la Russie et de la Chine auprès de la Syrie par exemple.

Les attentats terroristes sont une manifestation de la profonde fracture entre les EU et le monde musulman. L’Iran est devenu la puissance régionale dans la région, son programme nucléaire est une grave source de tensions entre ce pays, les EU et Israël. La disparition de l’URSS vit l’apparition de nouveaux États indépendants dans le Caucase (Arménie, Géorgie, Azerbaïdjan), cette région est aussi marquée par une forte instabilité du fait de la volonté de ces États d’échapper à la tutelle russe. Pour rétablir certaines influences les russes n’hésitent pas à intervenir en Géorgie en 2008.

La volonté de construire un réseau de gazoducs et d’oléoducs passant par la Turquie et évitant la Russie complique encore plus les choses.

Les interventions étrangères et les facteurs externes (exogènes) expliquent en partie les conflits de la région, il faut également mettre en avant des problèmes internes (endogènes) liés à la fragilité de l’État du fait souvent de la fragmentation de la société et aux relations complexes entre le politique et le religieux.

2.4 Des États fragiles et fragmentés
Faiblesse des constructions étatiques

Les exemples de la Syrie et de l’Irak aujourd’hui montrent la fragilité des constructions étatiques : les deux pays sont fragilisés par l’opposition confessionnelle sunnites/chiites et par l’opposition ethnique Arabes/Kurdes. Les tentatives américaines pour instaurer un gouvernement démocratique en Irak se sont heurtés à ce problème : le modèle démocratique occidental ne parvient pas à s’imposer dans un État où les populations se définissent par leurs appartenances religieuses ou ethniques plus que par leur appartenance à un État-nation. De plus, le tracé artificiel des frontières par les puissances britannique et française après la Première Guerre mondiale avait accentué cette fragilité.

a)

Ces nouveaux États qui apparaissant sur les ruines de l’Empire Ottoman sont souvent des États autoritaires sans traditions démocratiques et dans le cadre de sociétés fragmentées et divisées sur le plan religieux, ethnique ou tribal. Le pouvoir en   place s’appuie parfois jusqu’à nos jours sur des structures tribales et familiales, c’est le cas par exemple de la monarchie   de l’Arabie Saoudite, des structures religieuses communautaires comme l’était le pouvoir en Irak avant 2003, contrôlé par la majorité chiite qui marginalisait les minorités sunnites et Chrétiennes…A Bahreïn la minorité sunnite dirige le pays à majorité chiite, les Kurdes sont des minorités opprimées ou marginalisée en Turquie, en Syrie, en Irak et en Iran…

Les minorités sont négligées et persécutées comme les Kurdes participent au pouvoir, ainsi les Sunnites   et les Chrétiens en Irak au temps de Saddam Hussein, les Alaouites Chiites et les Chrétiens en Syrie sous le contrôle de la famille Assad.   La réalité nationale est loin d’être consolidée. Cette fragmentation peu parfois aboutir à des conflits dramatiques, ce fut le cas du Liban entre 1975 et 1989.

b)

Le Liban est une véritable mosaïque confessionnelle. On y trouve des musulmans divisés entre Sunnites, Chiites et Druzes. Les Druzes sont un courant de l’Islam issu du Chiisme. Ils pratiquent une religion ésotérique, les rites et les croyances sont réservés à des initiés. Ils croient aussi en la réincarnation. Les Chrétiens sont représentés par les Maronites mais aussi des Chrétiens grec-orthodoxes et grecs-catholiques.

L’arrivée de réfugiés Palestiniens après la création de l’État d’Israël en 1948 compliqua encore la situation. La France, à l’époque du mandat, avait créé un système politique qui reposait sur des équilibres confessionnels qui avantageaient les Chrétiens Maronites, mais donnait aussi une représentation aux deux autres confessions principales. Le Président de la République devait être Chrétien Maronite, le Président de l’Assemblée Nationale Musulman Chiite et le Premier Ministre Musulman Sunnite. Cet équilibre se maintint non sans difficultés jusqu’en 1975. Cette année, une terrible guerre civile éclata, elle dura jusqu’en 1989 et fit 14000 morts. Elle vit s’affronter principalement deux coalitions le Front Libanais chrétien dominé par les Maronites et le Mouvement National multiconfessionnel où l’on trouvait des Musulmans mais aussi des Chrétiens.

Le conflit prit une dimension régionale et déstabilisa toute la région du fait de l’implication des puissances régionales. Israël, la Syrie et l’Iran appuyèrent diverses factions.

Par exemple, l’Iran est toujours très proche du Hezbollah, le parti chiite libanais. La paix fut signée en 1989. La logique confessionnelle domine toujours la vie politique libanaise. On trouve une multitude de partis à base confessionnelle, ce qui rend très difficile la formation des gouvernements qui doivent construire des coalitions très complexes entre sunnites, chiites, druzes et chrétiens.

Depuis 2005, les violences confessionnelles et les assassinats ont repris, ces assassinats ont probablement été commis par la Syrie. L’exemple libanais nous montre la difficulté de construire des États dans des sociétés fragmentés, notamment sur le plan confessionnel. Les relations entre le politique et le religieux sont extraordinairement complexes dans cette région.

c)

Depuis l’intervention des EU et la chute de Saddam Hussein en 2003, l’Irak connait un processus d’instabilité et de fragmentation. L’unité assurée par la dictature de Saddam Hussein a laissé la place à une logique communautaire légalisée par une constitution fédérale qui reproduit les divisions ethniques et religieuse entre Chiites, Sunnites et Kurdes.

Les Chiites dominant le pays. La structure fédérale n’empêche pas des affrontements confessionnels meurtriers à travers des attentats entre Sunnites et Chiites. Les provinces kurdes du Nord qui forment le Kurdistan ont une autonomie totale qui n’est pas loin d’une indépendance de fait. D’ailleurs un conflit l’oppose au pouvoir central de Bagdad au sujet de la gestion de la ressource pétrolière. Les provinces irakiennes possèdent d’importants gisements et vendent directement le pétrole par la Turquie sans consulter la capitale, Bagdad.

La diffusion de la propagande islamiste iranienne chiite constitue également une menace pour les pays arabes du Golfe, majoritairement sunnites. En 1980, le président de l’Irak, Saddam Hussein, déclare la guerre à l’Iran en réclamant le Chatt Al-Arab, région riche en pétrole et habitée par des populations majoritairement arabes. Cette longue guerre de position, échappant à la logique de Guerre froide (chaque camp ayant des soutiens de l’Est comme de l’Ouest), fait près d’un million de morts sans gain territorial pour les belligérants.

d)

Le temps du nationalisme

Les États crées au XXème siècle ont entretenu et entretiennent toujours des relations complexes avec la religion. La Turquie a pu apparaitre pendant longtemps comme une exception et bien avant la seconde guerre mondiale, elle mène une politique de modernisation du pays en accordant par exemple d’importants droits aux femmes.

Après la Seconde Guerre Mondiale, des régimes nationalistes vont également prendre leurs distances avec l’Islam. On peut citer Nasser en Égypte entre les années 50 et 70. Nasser réprima d’ailleurs les mouvements politiques qui s’appuyaient sur l’Islam comme les Frères Musulmans.

Plus récemment de façon complexe, l’idéologie Baasiste laïque représentée par Saddam Hussein en Irak et la famille Assad, Hafez jusqu’en 2000 et son fils Bachar jusqu’à aujourd’hui, ont représenté des projets laïcs qui n’hésitaient pas à réprimer l’Islam majoritaire, le Sunnisme en Syrie et la Chiisme en Irak, et à s’appuyer sur des minorités religieuses, les Chrétiens dans les 2 pays et les Chiites Alaouites en Syrie et les Sunnites en Irak.

À partir des années 70, les modèles nationalistes qui avaient pris leurs distances avec l’islam, commencèrent à entrer en crise. Les échecs militaires face à Israël, un développement économique et social limité avec le maintien de fortes inégalités, le refus de la modernisation occidentale par de larges secteurs de la société expliquèrent cette crise du modèle nationaliste et la montée de l’Islamisme politique à partir des années 70.

La montée de l’Islamisme politique

L’Islamisme politique est un projet défendu par des Musulmans intégristes et fondamentalistes qui veulent créer un système politique et une société qui repose sur le droit islamique « la Charia ».

L’origine des l’Islamisme politique moderne remonte à la fondation de la Confrérie (association religieuse) des Frères Musulmans en 1928 en Égypte par Hassan al-Banna, dont l’objectif état l’application intégrale de la charia. Cependant l’Islamisme politique apparait réellement au cours des années 70 comme une force politique de premier plan.

Deux stratégies se mirent alors en place, la première visait à prendre le pouvoir et à créer un État islamique. L’exemple le plus notable jusqu’à ces 5 dernières années fut la Révolution Iranienne en 1979 dirigée par l’Ayatollah Khomeiny qui instaura un pouvoir religieux à la tête du pays.

en 1979, une « révolution islamiste » renverse le gouvernement pro-occidental du shah d’Iran. Ceci constitue un grave revers pour les Etats-Unis, qui perdent un allié précieux dans la région, notamment au moment où les Soviétiques envahissent le proche Afghanistan.

Des partis politiques islamistes apparurent dans le monde musulman chiite et sunnite et partagèrent cette stratégie de prise du pouvoir par le haut : le Hezbollah au Liban, le Hamas dans les territoires palestiniens, le vieux parti des Frères Musulmans… L’invasion soviétique en Afghanistan en 1979 permit la prise du pouvoir par les Talibans qui créèrent un État islamique renversé par les EU en 2001.

Une autre stratégie fut mise en place par l’Arabie Saoudite qui s’appuya sur une lecture très conservatrice de l’Islam « le Wahhabisme ». Il s’agissait de ré-islamiser la société par le bas sans prendre directement le pouvoir. L’argent du pétrole finança des écoles, des programmes d’aide sociale… qui contribuèrent à cette réislamisation de la société.

Le retour du port du voile pour les femmes, de la barbe pour les hommes en fut une manifestation.

À partir, des années 90 la radicalisation s’accéléra. L’apparition d’un islamisme terroriste avec Al Qaeda ou l’Etat Islamique en fut la manifestation. Il s’agit d’un islamisme terroriste mondialisé sans structure centrale hiérarchisé, composée d’une nébuleuse de groupes, sans lien direct avec un pays donné regroupant souvent des personnes qui ont été islamisées dans les pays occidentaux ou lors de la guerre contre les Soviétiques en Afghanistan. Les attentats contre les EU, et notamment le 11 septembre 2001, et d’autres pays marquèrent les années 90 et le début du XXIème siècle.

La radicalisation aujourd’hui concerne les groupes salafistes dans les pays musulmans, mais aussi dans les pays occidentaux. Ils peuvent être pacifistes ou employer la violence dans le cadre du Djihadisme qui se réclame ou non d’Al Qaeda. Cet Islam rigoriste, fondamentaliste et très conservateur veut une application intégrale de la charia. Il est très hostile au Judaïsme, très antisioniste, au Christianisme et aux Musulmans modérés. Ils ont une vision manichéenne du monde comme tous les fanatiques religieux, entre le pur «   Din » et l’impur « le Kufr ».

Les mouvements jihadistes sont au coeur des conflits actuels en Irak et Syrie, où l’EIIL (État Islamique en Irak et au Levant) lance des offensives contre les gouvernements en place et revendique la création d’un vaste État islamique.

Les Révolutions nommées « Printemps arabes », à partir de 2011, mettent en évidence les relations complexes entre modernité et religion dans le monde musulman, mais aussi les profondes fractures qui traversent l’Islam aujourd’hui.

Les Révolutions du « Printemps arabe »

Les bouleversements profonds connus par le monde arabo-musulman expliquent les Révolutions nommés « printemps arabes » qui touchent cette région depuis 2011.

Des changements profonds ont marqué la société arabe depuis plusieurs décennies et expliquent ces bouleversements. La société est de plus en plus urbaine et éduquée, notamment les jeunes et parmi eux les femmes, comme le montrent les taux d’alphabétisation et la baisse du taux de fécondité.

Ce sont souvent ces classes moyennes urbaines, jeunes, éduquées où les femmes sont fortement représentées, qui ont lancé ces mouvements révolutionnaires des « Printemps Arabes ». Ces mouvements ont commencé en Tunisie en décembre 2010, à la suite de l’immolation par le feu d’un marchand de fruit tunisien victime d’abus de la part de la police.

Le « Printemps arabe » a touché également l’Égypte, la Libye, le Yémen, la Syrie… Les principales motivations étaient de chasser les dictatures et les régimes autoritaires

clientélistes et corrompus et d’instaurer la démocratie, le respect des droits de l’homme, une plus grande justice sociale et la réduction des inégalités.

Ces mouvements ont provoqué la chute des Présidents Ben Ali en Tunisie, Moubarak en Égypte, Saleh au Yémen et Kadhafi en Libye.

Ces mouvements se caractérisèrent par leur modernité. Les mouvements ont défié les régimes en place grâce aux nouvelles technologies de la communication comme internet, les téléphones mobiles et les réseaux sociaux comme Facebook et Twitter, lesquels permettaient d’éviter la censure et d’organiser facilement les opposants.

Cependant, les Révolutions ne se limitèrent pas à une réalité virtuelle. Les affrontements et les morts de la Place Tahir au Caire, les affrontements violents en Libye et le drame de la Syrie où une véritable guerre civile a fait Jusqu’à présent plus de 300 000 morts.

L’enthousiasme des Révolutions a cependant   laissé la place à des situations parfois inquiétantes loin des idéaux de la jeunesse révolutionnaire.

Les révolutionnaires furent très efficaces lors des mouvements qui permirent la chute des dictatures, notamment du fait de la gestion des médias et de la communication sur le plan interne et international, cependant l’absence d’organisations politiques ne leur permirent pas d’accéder au pouvoir. Ce fut le paradoxe, ces mouvements qui s’inscrivaient dans la modernité tant sur le plan de son programme que des moyens techniques utilisés, laissèrent la place aux Islamistes très organisés politiquement.

Les Islamistes d’Ennahda en Tunisie et les Frères Musulmans en Égypte ont gagné les élections. Ce sont des Islamistes modérés qui acceptent la démocratie mais ont comme objectif l’islamisation de la société à travers la Charia dans les nouvelles constitutions. Ils s’inspirent des Islamistes turcs de l’AKP, au pouvoir en Turquie depuis 2002, qui acceptent la démocratie de type occidental, mais font reculer peu à peu le modèle d’Atatürk d’État laïc en ré-islamisant la société.

Les tensions avec les révolutionnaires de 2011 qui veulent un État laïc et qui protègent les droits des femmes, en Tunisie par exemple, sont fortes.

De plus les Islamistes modérés doivent affronter les Islamistes radicaux qui refusent la démocratie et toute modernité sociale. Les divisions ne concernent pas que les laïcs et les musulmans, mais aussi les musulmans entre eux.

En Libye, la fin du pouvoir autoritaire de Kadhafi a réveillé les tensions tribales et la fragmentation du pays. La province de Benghazi à l’Est du pays est en situation de sécession et la ville de Syrte a laissé place à l’installation de l’Etat Islamique vaincu en Syrie et en Irak.

La Syrie est en pleine guerre civile. Le pouvoir autoritaire de Bachar El Hassad affronte une opposition divisée entre ceux qui veulent une démocratie de type occidental et les Islamistes divisés entre plusieurs groupes financés par l ’Arabie Saoudite et le Qatar. Un groupe salafiste radical « Al-Nostra » est même proche d’Al Qaeda. À la chute du pouvoir d’Assad, la situation va être extrêmement compliquée entre laïcs et musulmans, et entre les musulmans eux-mêmes. La crise syrienne est en train de déstabiliser toute la région.

Elle entraine une implication des puissances régionales comme l’Iran et Israël, elle déstabilise le Liban…

Les pouvoirs islamistes sont parfois violemment contestés. Les mois de juin-juillet 2013 ont vu d’importantes manifestations en Turquie et la chute du Président Morsi et des Frères Musulmans en Égypte.

Ces divisions à l’intérieur des sociétés arabes sont cruellement ressenties après les espoirs des révolutions. C’est le retour de la Fitna, que l’on peut traduire par désordre, confusion, discorde division à l’intérieur de la communauté des Musulmans. Cette Fitna fut un traumatisme tout au long de l’histoire du monde musulman. D’ailleurs pour décrier les évolutions politiques actuelle dans le monde arabe, le terme de thawra, qui veut dire révolution, et a une connotation plutôt positive, est de plus en plus remplacé dans les opinions publiques arabes par le terme Fitna, très péjoratif.

L’évolution du vocabulaire est un bon reflet des espoirs déçus et de désenchantement qui parcourt aujourd’hui le monde arabe.

Dans une prochaine partie nous caractériserons plus précisément les conflits israélo-arabes, toujours sources de tensions violentes…