Woodrow Wilson est l’un des présidents américains qui aura marqué le plus le début du 20e siècle. Homme d’état, homme politique et président américain, il est né le 28 décembre 1856 puis décédé le 03 février 1924 à l’âge de 67 ans. Cet article retrace ses principales actions…
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Sa biographie
Thomas Woodrow Wilson, né à Staunton (Virginie) et mort à Washington (District de Columbia) a été le vingt-huitième président des États-Unis. Il fût élu pour deux mandats de 1913 à 1921.
Pacifiste convaincu, Wilson réussit à garder les États-Unis en dehors du conflit pendant les trois premières années de la Première Guerre mondiale. C’est à contrecœur qu’il intervient, et c’est pourquoi il lance l’idée d’une instance de coopération internationale, la Société des Nations, que les États-Unis ne rejoindront jamais. Il lui sera décerné le prix Nobel de la paix en 1919. Son père est pasteur de l’église presbytérienne et le jeune Woodrow reçoit une éducation fortement imprégnée de ses croyances ; il est aussi marqué par ses souvenirs de la Guerre de sécession et les désastres qu’elle a entraînés.
À 19 ans, il entre à l’université de Princeton puis commence des études de droit. Il s’installe en tant qu’avocat mais au bout d’un an il reprend ses études et se tourne vers l’histoire et les sciences politiques. Il présente sa thèse de doctorat à 30 ans ; une analyse en faveur d’un plus grand pouvoir de l’exécutif au sein du gouvernement central qui devint un classique des études en sciences politiques.
Influencé par des théoriciens britanniques comme Edmond Burke, Wilson est un libéral nostalgique de la pureté démocratique des premières années de la République. Il se destine à une carrière de professeur d’histoire mais rêve de s’engager en politique. En 1902, il devient président de l’université de Princeton et se lance dans une vaste réforme du système d’enseignement. Le Parti démocrate le contacte en 1910 et le présente en tant que candidat au poste de gouverneur de l’État du New-Jersey. Il est élu et, en à peine un an, se lance dans une réforme des lois électorales, désignation des candidats par des élections primaires directes, afin d’empêcher les machinations politiques. Il se fait rapidement remarquer par les chefs du parti au niveau national et réussit à se faire désigner candidat du Parti démocrate en 1912. Son colistier est un gouverneur de l’Indiana dont la notoriété reste désormais liée à cette remarque : « la seule chose dont ce pays a besoin, c’est d’un bon cigare à 5 cents ».
Sa campagne électorale est basée sur l’élimination des conglomérats industriels, la création d’un impôt fédéral sur le revenu et des élections sénatoriales au suffrage universel. Il s’oppose ainsi à Theodore Roosevelt qui est partisan d’un pouvoir présidentiel fort, garant des libertés, alors qu’il défend la concurrence comme facteur d’équilibre. L’élection présidentielle de 1912 est une vraie triangulaire entre le candidat du parti démocrate, le président sortant et candidat du Parti républicain et enfin Theodore Roosevelt qui fonde son propre parti progressiste quand il ne peut obtenir la nomination du Parti républicain. Woodrow Wilsonest élu grâce à la division au sein du parti républicain ; le total des votes de Taft et de Roosevelt est en effet supérieur à celui obtenu par Wilson.
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Quelques dates clés
: Investiture de Woodrow Wilson en tant que vingt-huitième président des États-Unis.
: Wilson fait un discours au Congrès pour obtenir la réforme des droits de douane. Il est le premier président depuis plus d’un siècle à s’être adressé en personne au Congrès.
: Wilson signe l’acte de reconnaissance de la République de Chine proclamée en 1912.
: Adoption du XVIIe amendement à la Constitution instituant l’élection des sénateurs au suffrage universel direct. Ils étaient auparavant élus par les assemblées législatives de chaque État.
: Wilson refuse de reconnaître le coup d’État au Mexique qui a porté le général Victoriano Huerta au pouvoir sans toutefois décider d’une intervention des États-Unis.
: Wilson signe la loi réduisant fortement les droits de douanes, augmentés par les gouvernements républicains précédents.
: Wilson signe le décret de création de la Réserve fédérale qui fait suite aux réflexions engagées après la Panique bancaire américaine de 1907.
: Wilson ordonne à la marine d’envahir le port de Vera Cruz, Mexique. Le prétexte est l’arrestation de quelques marins américains en goguette par les autorités mexicaines. L’Argentine, le Brésil et le Chili tentent une médiation qui se révèlera inutile après la démission forcée du président Huerta en juillet. Les troupes américaines se retireront du Mexique en novembre.
: Les États-Unis déclarent leur neutralité dans le conflit entre l’Allemagne et la Belgique, la France, le Royaume-Uni.
: Ouverture du canal de Panama.
: Wilson signe une loi majeure sur la réglementation des entreprises. Elle fait partie de son programme des « nouvelles libertés » et interdit les ententes entre entreprises, les participations au capital croisées dans un même secteur d’activité etc. Elle autorise les arrêts de travail, les grèves et le boycott par les ouvriers.
: Wilson et le gouvernement américain adressent une protestation à l’Allemagne suite au torpillage du RMS Lusitania, paquebot britannique, par un sous-marin allemand et au décès de 114 américains parmi les 1198 victimes civiles.
: Wilson ordonne l’intervention des troupes américaines à Haïti à la suite de l’assassinat du président et dictateur Guillaume Sam.
: Wilson propose la nomination de Louis Brandeis à la Cour suprême, le premier juge appartenant à la minorité juive.
: Wilson ordonne l’intervention des troupes américaines au Mexique pour capturer Pancho Villa qui combat le gouvernement mexicain légitime. Les américains ne quitteront le Mexique qu’au début de 1917 sans avoir réussi dans leur mission.
: Wilson ordonne l’intervention des troupes américaines en République dominicaine pour restaurer l’ordre public. L’occupation américaine durera jusqu’en 1924.
: Le Congrès vote l’augmentation de l’armée américaine en réponse à la détérioration des relations avec l’Allemagne.
: Le Parti démocrate désigne Wilson en tant que candidat à un second mandat présidentiel.
: Wilson signe le décret créant le Service des parcs nationaux.
: Wilson signe la loi instituant la journée de 8 heures pour les cheminots.
: Wilson est élu pour un second mandat. Son slogan électoral « Nous ne sommes pas en guerre, grâce à moi » résume la politique étrangère de son premier mandat.
: Le Congrès annule le veto du président Wilson mis aux lois empêchant l’admission des immigrants illettrés et restreignant l’immigration en provenance des pays d’Asie.
: Investiture de Woodrow Wilson pour un second mandat présidentiel. Dans son discours il rappelle que les États-Unis sont neutres dans la guerre entre l’Allemagne et les autres puissances européennes mais indique que cette position sera probablement très difficile à tenir.
: Wilson fait un discours au Congrès pour demander une déclaration de guerre des États-Unis contre l’Allemagne. Elle sera adoptée par le Congrès et le président le 6 avril. Le pays s’engage dans la Première Guerre mondiale.
: Wilson signe un décret créant un bureau chargé de l’information, de la propagande et de la censure pour la durée de la guerre.
: Adoption de la loi instituant le service militaire obligatoire pour les jeunes hommes âgés de 21 à 30 ans. Les États-Unis n’avaient pas connu de conscription depuis la fin de la Guerre de Sécession.
: Proposition par le Congrès d’un amendement à la Constitution instituant la prohibition (fabrication, transport et vente) de l’alcool. Il deviendra le XVIIIe amendement en 1919.
: Wilson prononce un discours au Congrès donnant la liste des 14 points nécessaires à l’obtention de la paix. « The world must be made safe for democracy » (La paix dans le monde pour l’établissement de la démocratie) réclame notamment la création d’une « League of Nations » (SDN)). Les autres points serviront de base au traité de Versailles de 1919. Les cinq premiers points, de portée générale, préconisent la fin de la diplomatie secrète, la liberté des mers, le libre-échange, la réduction des armements et le droit des peuples colonisés à disposer d’eux-mêmes. Les points suivants se rapportent au règlement du conflit : restitution de l’Alsace-Lorraine à la France, création d’un État polonais indépendant…
Le président suggère de réserver à la future Pologne un accès à la mer. La revendication hitlérienne sur ce fameux couloir de Dantzig sera à l’origine immédiate de la Seconde Guerre mondiale !
Le dernier point, reflétant l’idéalisme du président, annonce la création d’une
Voici le détail des 14 points que Wilson réclame :
► la fin de la diplomatie secrète,
► la liberté de navigation et de commerce,
►le retrait de toutes les barrières économiques,
►la réduction des armements,
► le règlement des rivalités coloniales,
► l’évacuation de la Russie
► l’évacuation de la Belgique
► la restitution de l’Alsace-Lorraine à la France,
► la rectification des frontières italiennes,
► l’autonomie des peuples d’Autriche-Hongrie
► l’évacuation de la Roumanie, de la Serbie et du Monténégro,
► l’autonomie des peuples non turcs de l’Empire ottoman (après le génocide des Arméniens)
► la refondation d’une Pologne indépendante,
► la création d’une association des nations. Les principes wilsoniens peuvent être résumés en trois mots : autodétermination des peuples, liberté et paix.
: après la signature de l’Armistice, le gouvernement allemand accepte d’ouvrir les négociations de paix à partir des « 14 points » développés par le président Wilson.
: Wilson embarque pour la France afin d’assister à la Conférence de paix de Paris.
: Wilson assiste à l’ouverture de la Conférence de paix de Paris. C’est la première fois qu’un chef d’État américain se rend à l’étranger durant son mandat.
: Wilson présente la Charte de la Société des Nations au cours de la Conférence de paix de Paris.
: Wilson présente en personne le Traité de Versailles à la ratification par le Congrès. Les Républicains y sont opposés et une partie significative des démocrates, conduite par Henry Cabot Lodge souhaite la soumettre à d’importantes restrictions.
En fait, Wilson réussit à faire passer une partie de son programme dans le traité de Versailles. Mais il n’est pas suivi par le peuple américain.
Craignant un engrenage fatal et des tensions internes entre les différentes communautés du pays, l’opinion publique et les parlementaires américains se placent en retrait par rapport aux velléités interventionnistes du président.
Le Congrès des États-Unis refuse de signer le traité de Versailles ainsi que d’entrer dans la Société des Nations (il y est encouragé par les élus d’origine irlandaise, qui font ainsi payer à Wilson son refus de soutenir la cause indépendantiste du irlandais). C’est un échec cuisant pour la diplomatie américaine et plus encore pour la paix future.
: Alors que le Congrès n’a toujours pas ratifié le Traité de Versailles, Wilson décide de parcourir les États-Unis pour prononcer des discours en faveur de sa ratification et pour promouvoir son idée de Société des Nations. La dégradation de sa santé l’empêchera de finir sa tournée. Épuisé, il a une attaque cérébrale après quoi il est paralysé et psychologiquement affaibli. Il intime, à partir de ce moment, que les démocrates votent la ratification sans concession. Le Congrès votera finalement contre la ratification le 19 novembre. Une deuxième tentative, explorant la voie d’un accord bipartisan, échouera en mars 1920 en raison de l’intransigeance de Lodge et Wilson.
Le républicain Warren Harding, qui se présente contre l’héritage de Wilson, est élu avec unelarge majorité par les électeurs américains.
: Wilson reçoit le Prix Nobel de la paix pour son action pendant la Première Guerre mondiale alors que sa popularité est au plus bas.
: Wilson déclare l’illégalité du Parti communiste.
: Le Congrès, qui continue à refuser la ratification du Traité de Versailles, vote la fin de l’état de guerre avec l’Allemagne. Wilson met son veto. Wilson abandonne le pouvoir en 1921. Il se retire dans sa maison de Washington, handicapé par sa paralysie et un début de cécité. Il continue malgré tout à soutenir son idée de « Ligue des nations » en publiant un livre et des articles. Il meurt le 3 février 1924 et sera inhumé dans la Cathédrale nationale de Washington.
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De l’isolationnisme à l’antiaméricanisme
Après la Grande Guerre, qu’eux-mêmes appellent (la ), les Américains souhaitent s’isoler du reste du monde, trop effrayant à leurs yeux. C’est la montée de l’, un courant politique qui se traduit dès 1919 par les premières restrictions réglementaires à l’immigration (celles-ci perdureront jusqu’en 1965). En 1924 est introduite l’obligation du visa.
Les Européens ne tardent pas à s’effrayer quant à eux de ce monde nouveau dont les deux millions de présents sur leur sol leur ont donné un aperçu. C’est la naissance de l’. La première manifestation en est littéraire avec la publication par Georges Duhamel de , un recueil de nouvelles qui dépeint les États-Unis sous un jour inhumain et ultra-violent (abattoirs de Chicago….).