Égalité et inégalités en France (Partie 1)

par | 12 Sep 2023 | Astuces dissertation

Les égalités et les inégalités sont des thèmes complexes à aborder dans des sujets de dissertation car ils demeurent très vastes et on ne sait jamais sous quels angles les traiter. Voici donc des pistes de réflexions qui vous permettront d’argumenter pour la majorité des problématiques afférentes aux égalités et inégalités… En France, l’égalité fait […]

Les égalités et les inégalités sont des thèmes complexes à aborder dans des sujets de dissertation car ils demeurent très vastes et on ne sait jamais sous quels angles les traiter. Voici donc des pistes de réflexions qui vous permettront d’argumenter pour la majorité des problématiques afférentes aux égalités et inégalités…

En France, l’égalité fait partie de la devise républicaine au côté des principes de liberté et de fraternité. Pourtant, les inégalités sociales ne cessent de se creuser et minent la société. Les riches sont plus riches qu’auparavant, les classes moyennes décrochent. La pauvreté, dont il est de plus en plus difficile de sortir, touche non plus seulement des chômeurs mais aussi des salariés. Face à ce phénomène, les pouvoirs publics s’emploient à adapter les réponses sociales. 

Jusqu’à la chute de l’Ancien Régime, on a perçu les inégalités sociales en termes d’ordres, de castes, de groupes séparés par des « privilèges » et des frontières infranchissables. Au 19 et au 20 siècle, avec la formation de la société industrielle, les inégalités sociales ont été appréhendées, que l’on soit marxiste ou pas, en termes de classes sociales structurant la société autour de deux grands pôles : la bourgeoisie et la classe ouvrière. Bien sûr, il y avait beaucoup de monde entre ces deux classes, mais ce sont elles qui structuraient la société et qui, de manière assez large, fondaient les grands mouvements sociaux et la représentation politique opposant une gauche censée représenter les travailleurs, et une droite proche de la bourgeoisie.

La question qui se pose aujourd’hui est de savoir comment représenter les inégalités sociales quand on s’éloigne de la société industrielle, tout en constatant que, non seulement les inégalités ne se réduisent pas, mais qu’elles sont de plus en plus mal tolérées par les individus. Au-delà de l’opposition grossière entre les riches et les pauvres, entre lesquels se déploient les classes moyennes et les classes populaires, il est évident que nous devons construire des représentations plus « fines » des inégalités. De manière générale, les « barrières » qui séparaient radicalement les classes sociales sont remplacées par une multitude de « niveaux » qui exacerbent la sensibilité des individus aux inégalités les plus proches. Par exemple, quand les inégalités n’opposent plus radicalement une minorité de jeunes bourgeois accédant au lycée à tous ceux qui travaillent, puisque tous ou presque vont désormais au lycée, celles-ci distinguent les filières scolaires, les établissements, les réputations et les « looks ».

Dans une large mesure, les inégalités sont vécues comme une épreuve individuelle puisque chaque position sociale cristallise tout un ensemble de contrastes plus ou moins congruents en termes de santé, d’éducation, de qualifications, de revenus, d’origines, de sexe, de sécurité… et parce que chacun pourrait franchir les petits niveaux qui le distinguent des autres. En définitive, les inégalités semblent se multiplier et s’individualiser ; alors que les représentations de la société en termes de classes paraissent s’éloigner, la conscience des inégalités s’exacerbe dans l’espace ouvert entre des castes des riches et des supers riches, et le monde des ghettos de pauvres et des laissés-pour-compte devenus « inutiles ».

 

Bien que les inégalités sociales soient évidentes, il n’est pas si facile de les définir précisément car tout dépend des critères choisis, des groupes retenus et des instruments de mesure. Si l’on choisit les revenus salariaux, les inégalités sont beaucoup moins prononcées que si l’on y ajoute les patrimoines très inégalement distribués.

Si on privilégie les catégories socio-professionnelles, la distribution n’est pas la même que si l’on choisit les sexes ou les âges : les femmes et les jeunes sont moins favorisés que les hommes et les plus âgés, mais il y a des femmes et des jeunes très riches et des hommes et des retraités très pauvres. Enfin, les inégalités ne sont pas réparties de la même manière selon les critères choisis : la santé, la sécurité de l’emploi, la qualité de l’environnement, le niveau scolaire…

Fort heureusement, le tableau complexe des inégalités n’empêche pas que se forme une représentation globale : les 10 % les plus riches ont des revenus environ quatre fois supérieurs à ceux des 10 % les plus pauvres. Ce rapport n’a guère bougé depuis une vingtaine d’années et la plupart des individus pensent se situer dans la classe moyenne parce qu’ils ne sont ni tout à fait en haut, ni tout à fait en bas. Mais si l’on s’approche des 1 % les plus riches, il y a eu un fort enrichissement alors que les revenus des autres Français ont stagné. Les riches sont les détenteurs de patrimoines financiers et les professionnels extrêmement qualifiés qui négocient leurs revenus un peu à la manière des footballeurs. Les pauvres sont évidemment les individus peu qualifiés, chômeurs et précaires et, souvent, les femmes seules ou formant une famille « monoparentale ».

 

L’analyse de la répartition spatiale des inégalités est redevenue très « à la mode » parce qu’elle renvoie à des représentations tangibles : quartiers « difficiles de banlieues et quartiers « bourgeois » et « bobos » des centres villes. Pour expliquer le vote en faveur du Front national, on a aussi pris l’habitude d’opposer les territoires riches, dynamiques et créatifs, aux territoires pauvres, précarisés, délaissés et vieillissants. Cette représentation n’est pas fausse, à condition de ne jamais oublier qu’il a quelques riches dans les régions pauvres, et beaucoup de pauvres dans les régions riches.

 

Pour l’essentiel, les inégalités ne naissent pas à l’école, mais il arrive que l’école les reproduise et parfois, les accentue. De manière générale, les inégalités culturelles (niveau d’études, qualification professionnelle…) entre les familles, déterminent les inégalités de performances scolaires des élèves. Aucune école ne neutralise parfaitement les effets des inégalités sociales sur les inégalités scolaires. Il faut cependant préciser que ce constat vaut « en moyenne » et que le destin scolaire individuel des élèves varie fortement autour de cette moyenne : des élèves défavorisés réussissent et des élèves favorisés échouent.

C’est d’ailleurs parce que les destins scolaires individuels varient autour des moyennes que l’on croit souvent dans la vertu d’une l’école qui serait capable de transformer des inégalités injustes, tenant à la naissance, en des inégalités justes, tenant au seul mérite des individus. En ce sens, si on ne peut pas dire que les inégalités naissent à l’école, on peut penser que l’école légitime les inégalités qu’elle produit puisque, au terme d’une compétition scolaire perçue comme équitable, les diplômes donnent accès aux positions sociales et aux métiers les plus valorisés. Pour peu que les inégalités scolaires reflètent les inégalités sociales, ce qui est le cas, on peut accepter la thèse d’une reproduction des inégalités par l’école et surtout, la thèse d’une légitimation de ces inégalités grâce à l’école.

Mais il arrive que l’école ne se borne pas à reproduire les inégalités sociales et qu’elle les accroisse dans la mesure où l’amplitude des inégalités scolaires est plus grande que celle des inégalités sociales. Dans ce cas, l’école accentue les avantages des plus favorisés, et les désavantages des moins favorisés. Contre toute attente, il semble que ce soit le cas de l’école française : non seulement la reproduction y est très élevée, mais les écarts de performances entre les meilleurs et les moins bons des élèves y sont bien plus prononcés que ce qu’impliqueraient les seules inégalités sociales.

 

Comment expliquer ce phénomène paradoxal dans un pays en principe très attaché à l’égalité des chances scolaires ?

Plusieurs explications peuvent être avancées, à commencer par une tradition éducative élitiste considérant qu’un des rôles essentiels de l’école est de distinguer les meilleurs, les autres devant être orientés vers des formations courtes et professionnelles. Le système des classes préparatoires, des concours et des grandes écoles couronne cette conception de l’école conçue comme une « machine à trier » en fonction des filières, des options, des établissements. Le deuxième type d’explication insiste sur l’inégalité de l’offre scolaire : on consacre beaucoup plus de ressources aux lycées qu’à l’école élémentaire, aux formations d’élite qu’aux formations de masse…

À terme, on donne plus à ceux qui ont plus. Enfin, dans la mesure où chacun sait bien que les diplômes déterminent les niveaux de rémunération et la qualité des emplois, il importe d’acquérir les diplômes les plus rares et les plus sélectifs. Et toutes les familles des classes moyennes et supérieures le savent bien en recherchant les établissements les plus sélectifs, en favorisant la précocité des apprentissages… en creusant les plus grandes inégalités possibles. C’est d’ailleurs ce qui explique que nous condamnons généralement les inégalités scolaires tout en rejetant les réformes égalitaires au nom du refus de la « baisse du niveau ».

 

Il existe plusieurs types d’impôt à commencer par l’impôt forfaitaire, indépendant des ressources et des revenus des individus. De toute évidence, ce type d’impôt, la redevance TV par exemple, n’est pas juste car il pénalise les plus pauvres sans entraîner la moindre redistribution sociale.

La plus grande partie des impôts et des prélèvements est de nature proportionnelle : on paie en fonction de ses ressources et de ses dépenses, mais dans ce cas, le taux de prélèvement ne varie guère. C’est le cas des cotisations sociales prélevées sur les salaires qui constituent environ 40 % des prélèvements : pour l’essentiel, elles augmentent proportionnellement aux salaires, même s’il y a des planchers en bas et des plafonds en haut.

La CSG, 10 % des prélèvements, repose elle aussi sur un taux fixe. Enfin, la TVA, dont le taux varie selon les produits, compte pour environ 15 % des prélèvements et dépend du niveau de consommation des individus.

Il existe aussi un impôt sur les bénéfices des entreprises. De manière générale, ces impôts peuvent être tenus pour justes car plus on gagne et plus on dépense, plus on paie.

Ces impôts sont très efficaces et constituent la plus grande part des prélèvements ; en revanche, ils ne sont pas fortement redistributifs puisque, en proportion de leurs revenus, les riches ne contribuent pas plus : les ménages modestes consacrent une part plus élevée de leurs revenus à la consommation, donc à la TVA, que les plus riches qui peuvent épargner.

Il reste les impôts progressifs dont le taux croît en fonction du revenu, ce sont les impôts directs que l’on déclare tous les ans. Une grande partie des foyers fiscaux ne sont pas imposés, mais, à partir du seuil d’imposition, plus on gagne et plus la part de revenu imposée s’élève. L’impôt direct progressif, qui constitue à peine 6 % des prélèvements, est lui fortement redistributif, mais aussi fortement contesté par les plus hauts revenus. Cependant, le patrimoine, bien plus inégalement réparti que les revenus salariaux, est nettement moins imposé et de façon moins redistributive.

Il est souvent difficile d’arbitrer entre la justice et l’efficacité des prélèvements et chacun est porté à voir le système du point de vue de ses intérêts. Mais il est possible d’affirmer que, en France, les prélèvements et les redistributions, sous formes de prestations sociales et de financement des services publics, réduisent très fortement, de près de deux fois, l’amplitude des inégalités sociales calculées avant prélèvements et redistributions. Cependant, le problème de la justice de l’impôt se pose aujourd’hui à travers les contestations fiscales d’un côté, et le sentiment de n’être pas aidé de l’autre.

La légitimité de l’impôt est contestée car le système est devenu si complexe et si « illisible » que chacun, riche ou pauvre, peut avoir le sentiment de se faire gruger. Non seulement il subsiste quelques centaines de niches fiscales, mais on ne compte plus les régimes de retraites et de cotisations sociales, sans oublier les mille manières de frauder.

La redistribution elle-même n’est guère plus lisible avec une foule de régimes de prestations, parfois si complexes que des ayants droit y renoncent, comme environ 1/3 des bénéficiaires potentiels du RSA. De plus, l’affectation des ressources prélevées reste souvent obscure : qu’est-ce que je paie, qu’est-ce qui est payé par les collectivités, et par quelle collectivité, la nation, les départements, les régions, les communes, la sécurité sociale, les caisses complémentaires … ?

La difficulté, pour un citoyen, de se représenter les mécanismes élémentaires du prélèvement et de la redistribution finit pas affaiblir la confiance car, faut-il le rappeler, l’impôt, est la première manifestation de la solidarité puisque je paie pour ceux que je ne connais pas, et ceux qui ne me connaissent pas paient pour moi.

 

À priori les inégalités salariales entre les femmes et les hommes devraient être réduites à peu. Les professions longtemps fermées aux femmes se sont ouvertes et, surtout, les femmes sont désormais plus diplômées que les hommes. Or, les écarts des revenus restent élevés entre 10 % et 20 % selon la manière dont on compte, ce qui ne peut s’expliquer par la seule survivance du machisme et de la misogynie, dont on ne doit pas sous-estimer le rôle, notamment dans la persistance du plafond de verre qui bloque l’accès des femmes aux plus hauts postes de responsabilité. Mais ce blocage ne suffit pas à expliquer les inégalités salariales entre les deux sexes.

On doit d’abord constater un phénomène troublant : en dépit de l’ouverture du marché du travail aux femmes au salariat et de leur haut niveau de qualification, les activités professionnelles sont fortement sexuées ou « genrées ». Il n’y a que 20 % des activités professionnelles dans lesquelles le taux de femmes et d’hommes se situe entre et 40 % et 60 % Pour l’essentiel les domaines d’activité restent fortement masculins et féminins et souvent, les domaines féminins sont moins bien payés.

On doit alors se demander pourquoi les femmes choisissent les domaines féminins. Au-delà des représentations sexuées – l’industrie pour les hommes, les services pour les femmes -, il semble clair que les choix professionnels des femmes anticipent la compatibilité de leur vie professionnelles et de leurs contraintes familiales. Elles savent qu’elles seront plus « responsables » de leur famille que les hommes et qu’elles devront y consacrer plus de temps. Or, certaines professions sont plus compatibles avec la vie de famille que d’autres. Une fois entrée dans une carrière professionnelle, les femmes prennent du retard sur les hommes au moment où naissent les enfants ; leur carrière est freinée pendant que leurs compagnons s’engagent plus fortement. Il est donc raisonnable de tenir l’inégale répartition du travail familial, notamment la responsabilité des enfants, pour la cause essentielle des inégalités de salaire entre les femmes et les hommes.

La meilleure preuve du poids des contraintes familiales, c’est que les femmes choisissent ou se voient imposer des temps partiels et des statuts précaires plus souvent que les hommes. On estime que 85 % des inégalités de salaires entre les deux sexes, « toutes choses égales par ailleurs », âges, diplômes, responsabilité.., s’explique par le temps partiel. Tant que les femmes auront la responsabilité des enfants et qu’elles s’en sentiront plus responsables que leurs compagnons, l’inégale division du travail familial entraînera des inégalités au travail. Même les pays les plus avancés, comme les pays scandinaves, ne sont pas parvenus à réduire totalement cette inégalité en dépit des crèches d’entreprises, des congés paternels obligatoires, des aménagements du temps de travail… En la matière mieux vaut être suédoise que française, française puisqu’il y a des crèches en France, qu’allemande puisqu’il y en a peu dans ce pays. Il reste donc un vaste chantier de réduction des inégalités entre les sexes, dans les entreprises bien sûr, mais aussi et peut être surtout, dans l’intimité des couples et des familles.

La démocratie moderne se caractérise par une extension indéfinie de la revendication égalitaire. L’égalité des chances est non seulement un modèle de justice majeur des sociétés démocratiques, mais également une morale et une vision de la société.

 

Dans les régimes démocratiques, qui se réclament des valeurs de liberté et de justice, la question des inégalités est centrale). Leur nature, leur mesure, leurs évolutions nourrissent les travaux ou les réflexions des économistes, des sociologues, des philosophes, tandis que leur réduction constitue souvent auprès de nombreux citoyens un élément d’appréciation important de l’action du gouvernement.

Dans un article intitulé « L’égalité, passion démocratique », Philippe Raynaud considère que « de l’Antiquité à notre monde « post-moderne », l’histoire de la démocratie peut être lue comme une histoire de l’égalité. Les régimes libéraux contemporains se voient comme « démocratiques » parce qu’ils affirment la valeur cardinale de l’égalité et parce que les gouvernants ne peuvent pas être légitimes s’ils ne reconnaissent pas cette valeur et s’ils n’affichent pas un certain intérêt pour le sort et pour les droits des plus démunis. La démocratie suppose une certaine égalité entre les citoyens, et celle-ci engendre à son tour une passion de l’égalité qui est donc dans tous les cas un ressort important du fonctionnement des démocraties.

Il est communément admis que la naissance et le développement de la démocratie à Athènes à partir de la fin du VIe siècle avant notre ère s’inscrivent dans le cadre d’une transformation globale qui a affecté tous les aspects de la culture ou de la civilisation grecque. Mais il faut aussi rappeler que, dans l’ensemble, la majorité des auteurs classiques a eu à l’égard de la démocratie une « attitude réservée, voire franchement hostile », qui se fondait sur une critique aiguë de ses principes.

La démocratie se fonde sur une égalité stricte ou «  » entre les citoyens, qui, aux yeux de la plupart des penseurs grecs n’est pas véritablement la justice, car celle-ci suppose une égalité qui répartit les biens ou les honneurs en tenant compte (de mérité, de besoin etc.) entre les hommes ou entre les citoyens. La critique la plus radicale et la plus élaborée est due à Platon, pour qui l’ »extrême liberté » de l’homme démocratique conduit nécessairement à l’excès de servitude que réalise la tyrannie (, livre VIII) mais il faut aussi noter que l’idée d’une dérive démagogique ou despotique de la démocratie, engendrée par la passion de l’égalité, est également présente chez des auteurs beaucoup plus favorables au régime athénien comme Thucydide ou Aristote.

Ces critiques de la démocratie n’ont jamais été oubliées et on en trouve l’écho jusque chez les auteurs les plus favorables à la République. La question va devenir plus présente avec les révolutions de la fin du XVIIIe siècle, qui vont donner naissance à ce que, quelques décennies plus tard, on appellera la « démocratie » moderne. Celle-ci porte toujours en elle l’idée que, si les hommes sont égaux sur un point fondamental, cela suffit à accorder partout une présomption favorable aux revendications égalitaires, mais le support intellectuel ou imaginaire de la passion égalitaire n’est plus du tout le même. Tout change dans les démocraties modernes dès lors que celles-ci se donnent pour fondement qui veulent que tous les hommes « naissent et demeurent libres et égaux en droit », ce qui fait de l’égalité (et de la liberté) des exigences « naturelles » et donc pré-politiques, à laquelle la démocratie doit satisfaire sans tenir pour acquise aucune distinction.

La Révolution française a en quelque sorte rendu visible ce qui restait encore à l’arrière-plan dans les révolutions anglaise et américaine : le fondement ultime de ce qu’on va peu à peu appeler la « démocratie » réside dans les « droits de l’homme » qui ont eux-mêmes deux faces ; d’un côté, la liberté et l’égalité ne sont pas seulement le fruit heureux d’une histoire particulière ou d’une action politique prudente mais des droits primitifs et inaliénables qui s’imposent dans toutes les dimensions de la vie sociale et, potentiellement, à toutes les sociétés humaines ; d’un autre côté, ces droits pré-politiques ont aussi une dimension politique radicale, car ils incluent le droit illimité à modifier l’ordre politique dans le sens de la liberté et de l’égalité.

La démocratie moderne se caractérise donc par une extension indéfinie de la revendication égalitaire, et c’est sur le sens de ce mouvement que s’opposent les grandes théories sociologiques et politiques. On peut considérer que Marx et Tocqueville expriment les deux interprétations fondamentales des tensions qui traversent les démocraties modernes. Pour Marx, la société démocratique ou libérale fait certaines promesses qu’elle ne tient pas : la promesse de l’égalité et de la liberté ne peut être réalisée que si l’on dépasse le cadre de la « société bourgeoise » et en particulier le droit bourgeois. » Pour « Tocqueville la démocratie se caractérise par une promesse indéfinie d’égalité qui fait que, d’un côté, on aura toujours des inégalités, mais qu’inversement, quelle que soit l’égalisation réelle qui pourrait se produire, elle ne mettrait pas fin à la demande d’égalité. De ce que les démocraties modernes sont continuellement affectées par de nouvelles revendications égalitaires, on aurait tort de conclure qu’elles sont nécessairement vouées à progresser vers ce qu’on appelait dans les années 1970 la « réduction des inégalités ».

 

 

Sources : François Dubet


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Jean-François 

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🌐 Engagement : Pionnier de l'éducation numérique, travaillant à révolutionner l'expérience éducative avec les technologies de pointe
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