La plupart des candidats à un concours de la fonction publique ne font pas la différence entre une ordonnance et une circulaire. Pourtant celle-ci est réelle…Voici donc comment les distinguer. Une vidéo en fin d’article vous explique en détail le principe des ordonnances…
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Les ordonnances
Les ordonnances sont prises en et doivent être signées par le président de la République. Une controverse a existé pour savoir si le chef de l’État était obligé de les signer. Le président Mitterrand a, quant à lui, refusé d’en signer plusieurs pendant la première cohabitation (1986-1988).
Les ordonnances entrent en vigueur dès leur publication. Mais un de ratification doit être déposé devant le Parlement. Si ce projet n’est pas déposé avant la date fixée par la loi d’habilitation, les ordonnances deviennent caduques. Une fois ce projet déposé, soit l’ordonnance est approuvée (ratifiée) par le Parlement et acquiert la valeur de loi, soit le Parlement refuse la ratification et l’ordonnance devient caduque, l’état du droit antérieur étant rétabli.
La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a introduit une nouveauté. Auparavant, la jurisprudence du Conseil d’État admettait la ratification implicite d’une ordonnance, résultant de sa modification par une loi. Désormais, l’article 38 de la Constitution exige que la ratification soit explicite.
Depuis le début de la Ve République, les gouvernements ont souvent recouru à la procédure des ordonnances pour des sujets très techniques ou des réformes très délicates. On peut ainsi donner l’exemple des « ordonnances Juppé » de 1996 ayant conduit à une importante modification du système de Sécurité sociale français. Le nombre d’ordonnances adoptées sur le fondement de l’article 38 de la Constitution est toutefois en forte augmentation depuis le début des années 2000. Cette augmentation est en partie liée à la nécessité de mieux assurer la transposition en droit français des directives prises par l’Union européenne.
2. La Constitution de 1958 prévoit six catégories d’ordonnances
– Les ordonnances de l’ancien article 92 de la Constitution. Cet article a été abrogé en 1995 parce qu’il s’agissait d’un article permettant pendant les premières années de vie de la Vè république de mettre en place les nouvelles institutions de la Vè République. Le Conseil constitutionnel fonctionne sur une ordonnance de ce type. Ces ordonnances ont toutes valeur législative.
– Les ordonnances de l’article 11 de la Constitution. Il s’agit d’ordonnances prises en vertu de lois référendaires. L’arrêt « Canal » du 19 octobre 1962 régit le régime juridique des ces ordonnances. Canal était condamné à mort et ses avocats ont essayé d’attaquer l’ordonnance mettant en place la cour de justice. Le Conseil d’Etat a sauvé la vie Canal en annulant l’ordonnance: ces ordonnances sont des actes administratifs qui peuvent être déférées au conseil d’Etat.
– Les ordonnances de l’article 16 de la Constitution. L’arrêt du 2 mars 1962 « Rubens de Servens » a dit que l’ordonnance de mise en application de l’article 16, c’est à dire l’ordonnance qui constate que les conditions de l’article 16 sont réunies, est bien un acte administratif mais elle est un acte de gouvernement, c’est à dire un acte qui n’est pas susceptible de recours devant le juge administratif.
– Les ordonnances que prend le Président lorsqu’il fait usage de ses pleins pouvoirs en vertu de l’article 16. On établit une distinction selon les matières. Les ordonnances relevant du domaine de la loi ne sont pas des actes administratifs et celles qui relèvent du domaine du règlement sont susceptibles de recours.
– Les ordonnances de l’article 38. l’article 38 de la Constitution autorise le parlement à voter une loi d’habilitation et cette loi permet au gouvernement d’intervenir dans le domaine de la loi par ordonnance. En 1986, pour les privatisations, le gouvernement Chirac voulait privatiser vite et s’est fait habiliter à prendre des ordonnances. Cependant, Mitterrand ne voulait pas signer les ordonnances et Chirac a du faire adopter une loi.
La loi d’habilitation fixe deux délais: un premier délai pendant lequel le gouvernement va pouvoir édicter les ordonnances et un deuxième délai pour déposer un projet de loi de ratification des ordonnances. En effet, les ordonnances de l’article 38 sont censées être ratifiées par le législateur a posteriori.
Néanmoins, on admet deux phénomènes: une ratification implicite, c’est à dire qu’il n’y a pas de loi de ratification spécifique mais on considère que toute loi intervenant par la suite dans un domaine concerné par une ordonnance peut valoir ratification implicite de l’ordonnance. Le deuxième phénomène est qu’une ordonnance ne soit jamais ratifiée.
On a quatre situations logiques:
- Le gouvernement dépose le projet de loi de ratification et le projet est voté. Les ordonnances acquièrent alors valeur législative.
- Le gouvernement dépose le projet de loi de ratification et le vote est négatif. Dans ce cas les ordonnances sont caduques et disparaissent de l’ordonnancement juridique.
- Le gouvernement ne dépose pas ou pas dans les délais un projet de loi de ratification. Le gouvernement méconnaît ses obligations en vertu de l’article 38 et les ordonnances doivent être abrogées.
- Le gouvernement dépose son projet de loi de ratification mais il n’y a pas de vote car le parlement n’a pas le temps. On dit que les ordonnances ont une double nature : elles sont législatives car seule une loi peut les modifier mais elles ont également une nature réglementaire car elles sont susceptibles de recours devant le juge administratif. L’arrêt du 3 novembre 1961 « fédération nationale des syndicats de police » vérifie cela.
– Les ordonnances de l’article 74-1 concernent les collectivité d’outre mer et la nouvelle calédonie. Le droit applicable dans ces territoires avant 2003 était les seules lois qui précisaient qu’elles s’appliquaient dans ces territoires. Désormais, le gouvernement peut étendre par ordonnance, avec éventuellement des dispositions nécessaires, les dispositions de nature législatives en vigueur en métropole au territoire d’outre mer.
Les lois de finances doivent être votées avant le 31 décembre de chaque année. Si ce n’est pas fait, le gouvernement peut adopter le budget par ordonnance.
3. Les circulaires et les directives
La circulaire est un texte qui permet aux autorités administratives (ministre, recteur, préfet…) d’informer leurs services. Il peut s’agir par exemple de faire passer l’information entre les différents services d’un ou du ministère vers ses services déconcentrés sur le terrain. Ces circulaires peuvent prendre d’autres noms, par exemple « note de service » ou encore « instruction ». On compte chaque année plus de 10 000 circulaires rédigées au sein des différents ministères.
Le plus souvent, la circulaire est prise à l’occasion de la parution d’un texte (loi, décret…) afin de le présenter aux agents qui vont devoir l’appliquer. Mais, la circulaire doit se contenter de l’expliquer, et ne peut rien ajouter au texte.
Le Conseil d’État distinguait traditionnellement :
- les « circulaires interprétatives » qui se contentaient de rappeler ou de commenter le texte (loi, décret surtout). Elles ne constituaient pas une décision, puisqu’elles ne créaient pas de règle nouvelle et les administrés ne pouvaient pas les attaquer devant le juge administratif ;
- les « circulaires réglementaires » qui ajoutaient des éléments au texte qu’elles devaient seulement commenter et ainsi créaient des règles nouvelles. Les administrés pouvaient alors attaquer ces circulaires devant le juge administratif. Très souvent, elles étaient annulées, car l’autorité qui les avait rédigées pouvait commenter la loi ou le décret, mais n’était nullement compétente pour ajouter à ces textes.
Depuis l’arrêt de section du Conseil d’État du 18 décembre 2002, la distinction entre circulaires interprétatives et réglementaires est abandonnée. Le Conseil d’État a fixé, comme nouveau critère de recevabilité pour les recours contre les circulaires, le caractère impératif. Ainsi, toute circulaire dotée de dispositions à caractère impératif est désormais attaquable.
Il faut enfin évoquer un décret du 8 décembre 2008, par lequel a été rendue obligatoire la publication électronique de toutes les circulaires sur un site internet (). Une circulaire qui ne serait pas publiée sur ce site ne peut en aucun cas être opposée aux administrés.
Une circulaire est un acte administratif destiné à interpréter une norme supérieure. Dans un premier arrêt du 29 janvier 1954 « institution notre dame du Kreisker », le Conseil d’Etat a élaboré une distinction entre les vrais circulaires et les circulaires réglementaires. Les vrais circulaires sont les circulaires exclusivement interprétatives et les circulaires réglementaires sont les circulaires normatives qui ont pour objet d’édicter une norme nouvelle: elles modifient donc l’état du droit.
Les circulaires uniquement interprétatives n’étaient pas susceptibles de recours car non considérées comme des actes administratifs normateur.
En revanche, les circulaires normatives étaient considérées comme des actes administratifs susceptibles de recours mais le problème était le suivant: les circulaires sont faites par les ministres mais ceux-ci ne disposent pas du pouvoir réglementaires et sont incompétent pour faire des circulaires réglementaires et la majorité des circulaires normatives étaient annulées. Pour savoir si une circulaire était susceptible de recours, il fallait voir si elle était réglementaire: le juge contrôlait le fond du recours avant même de juger de la recevabilité du recours. Le deuxième soucis était le suivant: si la loi ou le décret était contraire à une norme communautaire, la circulaire l’était aussi mais n’était pas susceptible de recours car purement interprétative.
Le Conseil d’Etat, dans son arrêt du 18 décembre 2002 « Mme Duvignières », a séparé deux problèmes de droits:
– La recevabilité du recours: quand est-ce qu’une circulaire est susceptible de recours? Une circulaire impérative est un acte administratif susceptible de recours.
– Le problème du fond: quand est-ce qu’une circulaire est irrégulière ? Soit parce qu’elle a été prise par une autorité incompétente et on retrouve le cas des circulaires normatives prises par le ministre ou pour toute illégalité pour d’autres motifs.
Pour les circulaires qui ne font qu’interpréter, le Conseil d’Etat isole deux cas: l’interprétation faite par la circulaire méconnaît le sens et la portée du texte qu’elle interprète. Si l’interprétation faite par la circulaire réitère une règle contraire à une norme juridique supérieure.